Révolution de 1848 détenu dans ponton à Brest, détails de son arrestation

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Lettre de François Bonnefoy de Paris. Durant la révolte des Journées de Juin en 1848 il est arrêté et envoyé à Brest pour être un détenu dans le ponton l'Uranie. Ici il écrit à son père avec les détails de son arrestation. Arrêté le 19 juillet 1848, il est gracié le 3 décembre 1849. 

Mon chère père,
J’ai reçu les lettres que vous m’avez envoyées et je suis fort étonné que vous n’ayez pas reçu les miennes, car je vous en ai écrit deux, et celle-ci est la troisième...Il est question sur nos pontons de nous transporter à Belle Isle en Mer; si cela arrivait, je vous prierais de faire alors toutes les démarches nécessaires pour prouver mon innocence, vu qu’alors on réviserait nos dossiers; c’est ce que vous saurez mieux que nous, sans doute, par la voie des journaux. Plusieurs lettres annoncent ici que huit nouvelles commissions viennent d’être nommées pour nous réviser, si cela est vrai, je ne doute pas que je sorte en liberté. D’ailleurs, Mon cher Père, voilà mon affaire :
 
            Arrêté le 13 juillet, par M. le Commissaire qui est venu le mandat à la main, me dire que je m’étais vanté d’avoir des armes cachées sous des planches dans les mottes; la perquisition ayant été faite, et n’ayant rien trouvé, ce qui prouve la fausseté de cette accusation, et le commissaire ayant parlé à mon bourgeois, et lui ayant demandé je m’occupais de politique, et s’il croyait que cette accusation fut vrai, car, après dix ans de travail continuel dans sa maison, il pouvait bien me connaitre, et après une réponse sans doute favorable, on fit encore des perquisitions à mon domicile : là, n’ayant rien trouvé de nouveau; j’ai présenté des certificats constatant que je m’étais opposé constamment aux barricades, et qui constataient que j’avais protégé la vie de plusieurs, et notamment d’un garde national, le commissaire ayant vu ces preuves; m’a dit que je retourne chez lui le même soir, en signer le procès-verbal...
 ... C’est alors que je fus accusé d’avoir tué des gardes mobiles comme on pourrait faire des perdreaux(?)  et de m’en être vanté, ce qui était de toute fausseté comme ma première accusation. Je fus donc arrêté le 19 pour cette dénonciation mensongère. Seulement, ce dont je n’étais pas accusé et qui pourtant étais vrai, et qui s’était su plus tard; car le juge d’instruction l’a dit à mon propriétaire, c’est que j’avais désarmé un garde mobile; mais c’est que le dimanche, étant descendu de chez moi pour savoir ce qui s’était passé la vielle, dans un groupe de monde, qui était à ma porte, on vit deux mobiles venir, et on dit dans le groupe, qu’il fallait prendre leurs fusils, pour les assommer avec; étant approchés, et comme on allait effectuer cette menace, un des deux fut assez heureux pour se sauver dans l’allée la plus voisine, mais, comme on renversa l’autre par terre et qu’on lui prit son fusil, j’ai à mon tour pris ce fusil, que j’ai cassé pour qu’on ne puisse s’en servir contre lui, ce qui fit qu’on ne lui a fait  aucun mal. Ce que je dis là, il y a plusieurs temoins quil l’ont vu, et que Julie pourra vous citer. Le commissaire de police chez lequel on me mena ne fit pas de procès-verbal sur moi...
 
Mon juge d’instruction se nomme M. Morin, son adresse : rue du Bac, 34.
 
--- Bonnefoy
 
Rade de Brest, Ponton l’Uranie
Plat 18, 5 octobre
 

 Envoyé à:

Monsieur Bonnefoy
Impasse Grenelle, 3, Au Gros Caillou
Paris

 

Tampons postaux:

‘PARIS – OCT 48 (60)’
‘BREST – OCT 48 (28)’
(troisième à déchiffrer)

 

4 pages: 3 avec texte, 1 avec l’adresse.

Plié pour former une enveloppe. Petit trou.

19 x 15 cm

 

Bonnefoy – François Antoine
Lieu de naissance : Choisy-le-Roi, Seine Âge : 24 ans
Domicile : Paris, Seine
Adresse : 147 Rue Mouffetard Quartier : Saint-Marcel Arrondissement : 12
 
Profession : Fabricant de mottes
Type d’activité : Articles de Paris
Secteur : Industrie
 
Décisions des commissions et conseils de guerre
Date d’arrestation (pour les seuls transportés) : 19/07/1848
Commission : 7
Décision : Transportation - 23/08/1848
 
Détentions
Date de départ pour Le Havre, nuit du : 02/09/1848
Sur les pontons, dans les forts ou les prisons : Ponton L'Uranie (Brest)
Détenu à Belle-Île, date d’arrivée le : 20/02/1849
Gracié le : 03/12/1849 

http://inculpes-juin-1848.fr

Les journées de Juin sont une révolte du peuple de Paris du 22 au 26 juin 1848 pour protester contre la fermeture des ateliers nationaux...Les journées de juin 1848 font de nombreuses victimesLes forces gouvernementales perdent environ 1,600 hommes dont un millier de militaires et gardes nationaux. La République réprime dans le sang la révolution parisienne. Le nombre d'insurgés tués pendant les combats fut estimé entre 3,000 et 5,000 personnes auxquelles s'ajoutent environ 1,500 fusillés sans jugement. Il y a environ 25,000 arrestations et 11,000 condamnations à la prison ou à la déportation en Algérie.

WIKIPEDIA

Les pontons : ce terme anodin désignait, au XIXe siècle, des navires désaffectés hébergeant des détenus avant leur déportation. En août 1848, deux mois après l’insurrection du 21 juin, le préfet maritime Leblanc, apprenant l’arrivée prochaine à Brest de 1.200 insurgés prisonniers, fit mettre en état deux frégates, la Guerrière et la Didon, chacune pouvant héberger 600 détenus couchés dans des hamacs. La place venant assez vite à manquer, la Belle-Poule et l’Uranie servirent de renfort. Chaque “ponton” fut placé sous le commandement d’un lieutenant de vaisseau et la surveillance de 25 hommes de garde. 19 insurgés moururent à Brest. Les autres furent pour la plupart envoyés en Algérie.

https://actu.fr/bretagne/brest_29019/des-prisons-flottantes-en-rade-de-brest_5184828.html